Si la Tunisie est le seul pays qui soit sorti, si ce n’est indemne du moins debout, des Printemps arabes de 2011, le contexte politique reste fragile, comme le révèle la fracassante démission du président de l’Instance électorale à quelques mois des élections municipales.
Ce mardi 9 mai, c’est par un bandeau défilant en bas de l’écran des programmes de la télévision nationale que les Tunisiens ont eu la surprise d’apprendre la démission de Chafik Sarsar, président de l’Instance électorale de Tunisie (ISIE). C’est au cours d’une conférence de presse qu’il a annoncé son départ, ainsi que celui du vice-président, Mourad Ben Mouelli, et d’un autre membre, Lamia Zargouni. Alors que l’Instance est en phase de transition entre anciens et nouveaux membres, les raisons de ce renoncement demeurent floues. Chafik Sarsar, sans plus de précisions, a évoqué des divergences de fond au sein de l’ISIE « touchant aux valeurs et principes sur lesquelles celle-ci est fondée » « Nous avons été contraints à cette démission », a-t-il ajouté. « Nous sommes des gens qui se respectent et qui respectons la Constitution » a, de son côté, confié à l’AFP, Lamia Zargouni.
L’instance électorale, qui semble traverser une crise sans précédent, est pourtant l’une des rares institutions indépendantes de Tunisie et a prouvé sa capacité à mener à bien les processus électoraux. Elle a d’ailleurs été saluée, ainsi que son président Chafik Sarsar, pour l’organisation des élections présidentielle et législatives de 2014.
Climat tendu À quelques mois des municipales prévues le 17 décembre 2017, les premières élections locales de la Tunisie post-révolution, dont M. Sarsar avait pesé de tout son poids pour accélérer la tenue, la nouvelle est pressentie comme un « fait grave qui aura d’importantes répercussions ». « Ce choc intervient dans un contexte politique déjà tendu, après un récent remaniement du gouvernement et une nouvelle tentative de la présidence de la République de faire passer un projet de loi décrié sur la réconciliation. On est dans une situation qui n’est pas sereine », a déclaré l’analyste Selim Kharrat, également à l’AFP.
Confrontée à une grogne sociale croissante, en particulier dans les régions défavorisées de l’intérieur du pays, la Tunisie doit donc trouver de toute urgence des remplaçants aux membres démissionnaires de l’ISIE. Ce sont les députés qui auront la charge de les nommer d’ici la fin de la session parlementaire, afin de ne pas retarder les élections municipales tant attendues, les mairies étant gérées depuis 2011 par de simples délégations chargées des affaires courantes, ce qui impacte considérablement le quotidien des Tunisiens.
Olivier DUBOIS