Autosuffisance en riz : Ça coince toujours

La production du riz local ne cesse de croître, mais demeure insuffisante.

Les produits agricoles occupent aujourd’hui en Côte d’Ivoire la seconde place dans le tableau des importations (environ 19%), derrière le pétrole et les produits miniers (environ 23%) et les produits manufacturés (près de 54%). Parmi ces produits agricoles, le riz tourne autour de 60% des importations. Cette denrée reste la première céréale consommée dans le pays, avec 60 à 70 kg par habitant et par an. Pour atteindre l’autosuffisance alimentaire, les autorités ivoiriennes ont vite compris qu’il faudrait se suffire en riz. Mais la tâche ne sera pas aisée

En 2020, les Ivoiriens pourront peut-être manger leur propre riz, sans avoir à importer un seul grain. Si l’on en croit les chiffres annoncés le 6 juin dernier après le Conseil des ministres, la consommation actuelle (1,8 million de tonnes par an) sera même dépassée. Pour cela, selon Bruno Koné, le porte-parole du gouvernement, il suffira de porter la production locale à 1550 000 tonnes cette année et à 1 966 000 tonnes en 2020.  On le sait, depuis l’élaboration en 2012 de la Stratégie nationale de développement de la riziculture, à  travers l’Office national de développement du riz (ONDR), le taux de couverture n’a jamais été aussi prometteur. De 1,079 million de tonnes en 2012, les Ivoiriens en sont à environ 1,4 million de tonnes aujourd’hui. Soit un taux de couverture de 79% de la consommation nationale. Le gouvernement pense pouvoir atteindre les 84,70% fin 2018 et 102,10% dans deux ans. La clef ? D’après Bruno Koné, la Côte d’Ivoire va pouvoir compter sur l’aide d’un partenaire de poids : l’Inde. Le pays de Gandhi vient de lui octroyer une ligne de crédit de 30 millions de dollars, via Exim Bank of India (autour de 16,5 milliards de francs CFA). Une somme qui permettra de financer l’installation et l’acquisition d’un certain nombre d’équipements. Et, cette fois-ci, les autorités ne vont pas lésiner sur la quincaillerie : 30 unités de production de riz blanchi sont annoncées. Chacune aura, d’après le porte-parole du gouvernement, une capacité de 25 000 tonnes par an. « Douze unités sont déjà montées. Les dix-huit autres le seront au plus tard le 31 décembre de cette année », a tout de même pris soin de souligner Bruno Koné. Ce n’est pas la première fois que le pays compte sur l’aide de ses partenaires. Fascinés par l’expérience asiatique en la matière, les Ivoiriens ont déjà reçu le soutien du Japon, avec son projet Kennedy Round (KR 2012) : réhabilitation de bas-fonds, production de semences sélectionnées et apport d’appui logistique à l’ONDR. Exécuté de 2014 à 2016, KR 2012 a mis depuis 263 hectares de bas-fonds à la disposition des producteurs locaux. La Chine, grand connaisseur dans le domaine, bombarde déjà les riziculteurs de dons quand elle le peut. Ces derniers ont déjà reçu du matériel d’une valeur de 1,5 milliard de francs CFA : engrais, motoculteurs, faucheuses, batteuses, décortiqueuses, etc.

L’exemple asiatique À côté des ONG, qui œuvrent entre formations et appuis logistiques, Pékin a aussi décaissé 2,7 milliards de francs CFA pour l'aménagement de 442 hectares à l’intérieur du pays. Bref, qu’elle soit isolée ou incluse dans la Stratégie nationale de développement de la riziculture (SNDR), l’aide extérieure n’a jamais manqué aux riziculteurs. À part que, cette fois-ci il s’agit de 30 unités de production. Suffisant pour s’auto-suffire en riz dans deux ans? La question est d’autant plus pertinente que la SNDR a raté un premier rendez-vous, celui de 2016.  Le pays n’avait pas atteint l’autosuffisance alimentaire promise. Les raisons ? Les producteurs sont partagés. Une faible capacité de production, note Théodore Djiké, directeur d’une société coopérative de riziculture à Touleupleu. Et le problème persiste. Pour la culture en bas-fonds, par exemple, Djiké indexe l’aménagement, coûteux. C’est quelque chose qui se fait avec des appuis extérieurs. Lazeni Coulibaly, Président directeur général de la Société conseil organisation et management de Côte d’Ivoire (SOCOMICI), notamment dans l’agro-industrie, pense que les producteurs n’ont pas bénéficié des moyens conséquents leur permettant de vivre de leurs récoltes. Singo Sidiki, le Président de la Fédération nationale des riziculteurs de Côte d’Ivoire (FENARIZ-CI) est plus modéré. Si le rendez-vous de 2016 a été raté, dit-il, c’est simplement parce qu’il était trop proche. « Les surfaces cultivables en riz sont suffisantes pour produire à la hauteur de la demande. Bien que nous en demandions plus, nous ne pouvons pas nous plaindre de l’existant. Le problème n’a jamais été à ce niveau. C’est au niveau de la transformation qu’il fallait agir. Avec les usines, on peut prétendre conquérir le marché et être compétitifs. C’est ce qui nous a toujours manqué ».

La clef? La transformation Les 30 unités de production annoncées par le gouvernement, selon le producteur, seront d’une grande utilité. « Dans tous les domaines, une fois que la transformation est bien huilée, les producteurs deviennent plus compétitifs », poursuit le président de la FENARIZ-CI. Le problème de la concurrence du riz importé est selon lui banal. Et Sidiki Singo de s’expliquer : « si nous arrivons à satisfaire la demande, les importations cesseront et il n’y aura plus de concurrence. Donc, ce n’est pas un problème en soi ». Mais, du côté des consommateurs, on n’en est pas si sûr. Aujourd’hui, combien d’Ivoiriens consomment-ils du riz local ? Où le trouve-t-on lorsqu’on en a besoin et à quel prix ? Ce sont autant de questions que se pose Ben N’Faly Soumahoro, Président du mouvement des consommateurs « Le réveil »'. «Il faut d’abord tenir compte des habitudes alimentaires des Ivoiriens. Beaucoup préfèrent le riz importé de qualité. Ils vont s’approvisionner au supermarché et dans les grandes surfaces », note-t-il. Et, d’après M. Soumahoro, c’est là que le bât blesse, parce qu’il y a tout un travail à abattre pour susciter l’engouement autour de cette denrée alimentaire. Pour lui, la Stratégie nationale de développement de la riziculture doit être accompagnée d’un certain nationalisme, avec comme engrais le « consommer ivoirien ». En clair, amener les Ivoiriens à aimer ce qu’ils produisent. On comprend aisément que ce ne sera pas une sinécure lorsque Ben N’Faly Soumahoro ajoute : « beaucoup sont persuadés que manger du riz local est synonyme de pauvreté ». C’est faux, s’empresse de corriger le président du mouvement de consommateurs. « Le riz local est riche, au contraire, et de meilleure qualité. C’est du riz local que je consomme ». Les producteurs en sont conscients. Cependant, il faut d’abord produire, selon eux, avant de parler consommation. « Il faut multiplier les projets d’accompagnement aux producteurs et aux jeunes entrepreneurs agricoles », indique Lazeni Coulibaly. La Côte d’Ivoire continue d’importer environ un million de tonnes de riz par an, ce qui signifie pour les producteurs que c’est près d’un million de tonnes en plus qu’on leur demande de produire d’ici 2020. « C’est une quantité importante. Nous sommes à 1,3 million de tonnes de riz aujourd’hui. Pour cela, il a fallu des années, des hectares de terres, des moyens de production, etc. », explique Djike. Le producteur pense qu’il faudra nécessairement passer par une mécanisation accélérée de la riziculture locale. C’est un plan coûteux, évalué à 672 milliards de francs CFA à mobiliser. Le SNDDR suffira-t-il ? Il y a longtemps que le gouvernement a compris que les producteurs locaux seuls ne pourront pas porter sur leurs épaules l’autosuffisance alimentaire en riz. Il faut des investisseurs étrangers. Le géant américain Cargill et Louis Dreyfus Commodites (LDC), en 2013, ont été approchés pour l’exploitation de parcelles de terre à l’intérieur du pays. Hélas, ces deux projets se sont heurtés à un fâcheux écueil : selon la loi ivoirienne, impossible de céder la terre à un étranger. « D’autres investisseurs viendront. Il faut continuer les négociations, proposer des locations de parcelles », propose Singo. Yacouba Dembélé, Directeur de l’ONDR, est réaliste sur ce point. Ce sera au secteur privé de porter à bras-le-corps cette politique rizicole. « Ici, l’État n’est qu’un facilitateur. Il faut une implication du secteur privé, qui va maîtriser l’ensemble des éléments de la chaîne, la production, la transformation, la distribution ». D’après l’ONDR, la porte est ouverte aux investisseurs dans tous les compartiments du secteur, même le transport. C’est dans la maîtrise de cet ensemble que l’autosuffisance en riz sera possible en 2020.  

Raphaël TANOH

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