Violence citoyenne : Jusqu'où?

Parfois sans armes, les forces de l’ordre assistent impuissant à la destruction de leurs biens.

Allons-nous vers une escalade de la violence en Côte d’Ivoire ? Les différentes attaques d’édifices publics et de représentants de l’État laissent transparaitre un malaise, comme si un ressort était cassé. Le bilan du dernier acte du genre, à Bloléquin, fait état deux morts, de la mise à sac des résidences du préfet et du sous-préfets, pillées, et de l’incendie de la brigade de gendarmerie, en plus du pillage des résidences de tous les gendarmes de la ville. Ce genre d’incidents, le pays en a enregistré une dizaine entre 2017 et 2018, mettant ainsi à mal l'autorité de l’État. Des violences sporadiques ? Si l’on n’y prend garde, elles peuvent déborder à tout moment et remettre en cause la stabilité des institutions et du pays.

Début février, la Commission nationale des Droits de l’Homme de Côte d’Ivoire (CNDHCI) faisait observer que depuis plusieurs mois elle notait la multiplication d’actes d’incivisme, se manifestant sous la forme d’une défiance totale à l’égard des autorités publiques et / ou de destruction de biens et d’édifices publics et privés. « La violence contre les édifices publics semble avoir été érigée en mode d’expression prioritaire en vue de satisfaire des revendications », indiquait Namizata Sangaré, Présidente de la CNDHCI. C’est que, du 31 janvier 2017 au 17 février 2018, la Côte d’Ivoire a enregistré sept évènements de ce type. Pour rappel, le 31 Janvier 2017, à Bougouasso (département d’Odienné, Nord), pour protester contre un rapport mettant en cause des soldats du Bataillon de sécurisation du Nord-Ouest dans une affaire de « tentative d’assassinat » d’éleveurs, le sous-préfet de la zone avait essuyé des menaces de mort et une attaque contre son domicile. Le jeudi 6 avril 2017, à Hiré (Centre ouest), des populations avaient attaqué la brigade de gendarmerie, suite à la mort d’un jeune orpailleur.  Le 4 mai 2017, à Ouangolo, (Nord), l’on enregistrait le pillage du domicile et des bureaux du préfet, qui a dû être exfiltré. Cela faisait suite à un litige foncier opposant deux communautés. Le 2 novembre 2017, à Guiglo (Ouest), des populations lançaient une attaque contre les bureaux et la résidence du préfet après la mort d’un autochtone dans un conflit intercommunautaire. Le 21 novembre 2017, à Katiola (centre nord), l’on enregistrait une attaque contre plusieurs agents de l’Office ivoirien des parcs et réserves (OIPR) en mission dans la réserve du Haut Bandama. Cet incident avait causé la mort d’un civil et d’un policier.  Suite à l’incendie du marché de Soubré (ouest), dans la nuit du 4 au 5 février, l’on a assisté le 6 février 2018, au saccage et à l’incendie des locaux de l’Hôtel de ville et du domicile du Maire par des manifestants. Ce décompte, qui fait état d’une moyenne d’un incident de ce type tous les deux mois, laisse présager d’un retour à la violence chez certaines populations ivoiriennes. Sauf que, cette fois, cette violence est orientée vers les symboles de l’État ou ceux qui le représentent.

 

Ras-le-bol ?  En attendant que les enquêtes ouvertes ne donnent des résultats, l’on note qu’il pourrait s’agir de l’extériorisation d’une série de frustrations, accumulées par les populations du fait de la pauvreté et des rackets que les citoyens subissent dans le pays profond. « Les policiers, les gendarmes et le corps préfectoral » y règnent souvent en maitres absolus, « la loi, ce sont eux » tentent d’expliquer sous cape un élu local. Et, ajoute-t-il, les populations ont le sentiment de ne pas être écoutées. « Elles ont l’impression de ne pas avoir d’interlocuteur. Cela développe parfois un sentiment de rejet de tout ce qui est autorité ». Cette montée de la violence pourrait également trouver sa source dans l’impunité de certains faits antérieurs. « Quand, pour des raisons qui leur sont propres, des militaires tirent n’importe comment, sans crainte d’être sanctionnés, quand des gendarmes ou des policiers sont pris à partie sans que les fautifs ne soient sanctionnés, cela entraine inéluctablement une mauvaise contamination. Chacun pense pouvoir se rendre justice lui-même » explique l’élu cité plus haut. Joint au téléphone, un chef de Guiglo, sous anonymat, tentant d’expliquer les frustrations, affirme « nos peuples croulent sous le poids des difficultés sociales, sans pouvoir bénéficier d’une protection émanant de ceux à qui il ont pourtant donné mandat de le faire. Des terres sont illégalement occupées dans certaines zones, au détriment des propriétaires, qui n’espèrent plus aucune restitution ». Mais, relativise ce dernier, l’incivisme des populations a atteint une proportion très élevée et cela « n’est pas un bon signe. Les politiques se sont contentés d’organiser les élections pour une sortie politique de la crise, sans que les questions essentielles du foncier et de la cohabitation entre les Ivoiriens ne soient traitées » déplore-t-il.

Faiblesse de l’État L’époque où les préfets et sous-préfets (représentants du Président de la République) étaient craints semble bien loin. On peut même parler de mythe brisé. Certains Ivoiriens, indiquent des observateurs, ne croient plus au fait que l’État et ses démembrements puissent régler leurs problèmes. Si cela est dû en partie au fait que de 2000 à 2010 plusieurs circonstances ont concouru à affaiblir les institutions, leurs symboles et leurs représentants, il est tout aussi vrai que le comportement peu républicain de certains d’entre eux a aussi contribué à ternir leur image. C’est que, dans plusieurs circonscriptions, le corps préfectoral s’est retrouvé impliqué dans la gestion de plusieurs litiges sérieux autour de questions économiques et de survie, notamment le foncier ou les mines d’or clandestine. Une position qui les expose à la vindicte populaire, d’autant qu’en général ils ne disposent que d’un ou deux gardes du corps non armés. Il faut aussi noter que le fait que les forces de l’ordre ne soient pas ou soient peu dotées en armes a largement contribué à faire baisser le capital respect dont elles bénéficiaient aux yeux des populations. « Pour une mission qui implique au moins trois gendarmes, nous n’avons parfois qu’une seule kalachnikov. Qu’est-ce qu’un gendarme sans arme ? À Bloléquin, des gendarmes désarmés ont été obligés d’assister à la mort de leur collègue sans pouvoir réagir », confie à JDA un gendarme désabusé. Depuis la fin de la crise, la dotation en armes de certaines forces de l’ordre n’est pas encore effective, l’embargo sur l’achat des armes n’ayant été levé que fin 2015.

Consolider la paix Pour le gouvernement, il s’agit de mettre plus en avant les décisions et actes qui peuvent, en pareille situation et au plus tôt, ramener le calme au sein des populations. La posture a toujours été de dépêcher un ministre influent dans la zone du conflit afin d’apaiser les esprits. Mais cela révèle aussi la faiblesse des autorités coutumières et le manque de poids des élus locaux et autres cadres. Pour rappel, le cas de Bouna avait nécessité le déplacement du Président de la République Alassane Ouattara et la ministre Anne Désirée Ouloto, cadre de l’ouest, a été mise à rude contribution à Guiglo et à Bloléquin.  Pourtant, en pareille circonstance, les voix des chefs et rois coutumiers, désormais bien organisés, devraient se faire entendre. À date, aucune des enquêtes lancées après ces divers incidents n’a encore abouti à un procès en justice. C’est qu’au-delà des actes de vandalisme, la situation socio-politique semble imposer son calendrier à une justice parfois lente. En attendant que la lumière soit faite sur tous ces évènements à plusieurs inconnues et à nombreux relents, les regards restent tournés vers le gouvernement, l’institution la plus forte actuellement.

 Ouakaltio OUATTARA

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