Cacao : La Côte d’Ivoire et le Ghana peuvent-ils résister ?

La chute des cours du cacao en décembre 2017 a secoué les deux premiers producteurs mondiaux mais les a également poussés à vouloir prendre les choses en main. Entre course à la transformation locale et contrôle des prix au niveau international, jamais la Côte d’Ivoire et le Ghana n’avaient autant renforcé leurs liens. Passant de la concurrence au partenariat, les deux pays, qui produisent un peu plus de 65% du cacao mondial, espèrent en se mettant ensemble ne plus subir les diktats des grands chocolatiers. La décision de suspendre la vente de leurs fèves pour les campagnes 2020 et 2021 s’inscrit dans ce cadre. Une décision courageuse, certes, mais l’économie des deux pays en dépend. Pourront-ils tenir ?

Les prix du cacao pour les producteurs ont toujours été bas. Trop bas pour des milliers d’acteurs. Les politiques se succèdent pour améliorer leurs conditions mais sont tributaires des cours mondiaux. Car les grands groupes transformateurs font la pluie et le beau temps. Officiellement, le revenu journalier d’environ 6 millions de petits producteurs, concentrés en Afrique de l’Ouest, se situe entre 500 et 1 000 francs CFA par jour. Ce que veulent changer les pays producteurs. Mais ils n’en sont pas à leur premier essai. Dans les années 1980, le Président Félix Houphouët-Boigny avait déjà tenté de stocker le cacao ivoirien pour faire grimper les cours, sans succès. Il avait vite abandonné cette politique. Près de quarante ans après, le contexte est différent, car la Côte d’Ivoire est parvenue à convaincre le Ghana de coordonner leurs actions. Sauf que, outre les soucis de stockage qui pourraient rapidement survenir, l’économie ivoirienne, contrairement à celle du Ghana, repose essentiellement sur le cacao, pour un peu plus de 10% du Produit intérieur brut (PIB). Comme l’Organisation des pays producteurs du pétrole (OPEP), les deux pays se sont rendus à l’évidence qu’ensemble ils peuvent aller loin. Mais le chemin reste semé d’embûches, tant au niveau international qu’au niveau local. En attendant de voir ce que cela donnera lors de la campagne 2019 – 2020, qui débute le 1er octobre, les officiels des deux pays se rencontreront en août prochain afin de finaliser leur nouvelle stratégie, avec une charte commune pour l’encadrer. Ils comptent également définir un accord sur les politiques de lutte contre la déforestation. Parmi les autres éléments de cette stratégie, les multinationales du cacao, qui développent des programmes d’augmentation de production avec les coopératives de paysans, devront désormais être en adéquation avec les politiques nationales.

Une surproduction néfaste Dans la règle de l’offre et de la demande, la surproduction du cacao n’est pas faite pour arranger les choses. Après avoir chuté de 30% en 2017, le cours mondial a légèrement évolué en 2018 pour atteindre 1 300 000 francs CFA la tonne (2 000 euros). Voulant réguler le marché, la Côte d’Ivoire et le Ghana ont-ils vraiment évalué les stocks des acheteurs et des fabricants de chocolat ? s’interroge un trader à Abidjan. D’autant que, selon l’Organisation internationale du Cacao (ICCO), le marché mondial est actuellement bien approvisionné, avec un excédent estimé à  36 000 tonnes sur la campagne 2018 - 2019. « Cet argument, sur lequel surfent les chocolatiers, ne tient pas. La consommation de chocolat est en hausse dans le monde et le besoin de fèves sur le marché est grandissant », répond une source proche du Conseil café - cacao (CCC). L’objectif pour les deux pays est d’atteindre un prix minimum de 1 500 000 francs CFA la tonne. « Avec ce prix, nous pourrons parler d’une rémunération décente pour le travail des cacaoculteurs », affirme le directeur général du CCC, Yves Koné. Sur les 100 milliards de dollars de chiffre d'affaires de la filière chocolat au plan mondial, selon les chiffres officiels, seul 6 milliards reviennent aux producteurs. Depuis les années 90, les prix du chocolat ont quadruplé, alors que les revenus des producteurs n’ont pas augmenté. Les deux pays se sont engagés à faire en sorte ce prix plancher entre en vigueur. Face à l’intransigeance des producteurs du Ghana le 5 juin, les acteurs du marché (traders, transformateurs et industriels) ont demandé la tenue d'une réunion le 3 juillet à Abidjan, pour déterminer comment mettre en œuvre concrètement la mesure, annoncée il y a près de deux ans pourtant. Plusieurs observateurs du secteur étaient sceptiques, mais c’était sans compter avec la détermination des Présidents Alassane Ouattara et Nanna Kuffo Ado, qui, au fil des réunions, ont instruit à leurs différents services de rapprocher leurs mécanismes de fonctionnement des filières et d’harmoniser leurs politiques afin de présenter un front plus uni face aux géants et aux marchés mondiaux du cacao.

Pari risqué Les deux pays jouent gros en essayant de changer la chaîne de valeurs du cacao. La hausse de la production est menacée par le changement climatique, dans la mesure où le cacao est une plante fragile, qui exige un certain équilibre entre humidité (environ 80%) et chaleur (28°). Un équilibre mis à mal par le réchauffement des températures. De plus, le risque de pénurie est anticipé par les opérateurs, qui augmentent leurs stocks et poussent à la surproduction par peur de la raréfaction. Le marché, pour l’heure, reste tout de même favorable et a d'ailleurs réagi dans le sens voulu par le Ghana et la Côte d'Ivoire, puisque les cours ont légèrement grimpé. La demande de cacao reste également forte sur tous les continents, mais des craintes se font jour sur la production ghanéenne, qui subit un regain de « swollen shoot », le virus qui tue les arbres. Les deux pays courent également le risque de susciter la création de concurrents à long terme. Certaines multinationales commencent à regarder vers de petits pays producteurs, et donc moins exigeants, tels que le Cameroun, le Nigeria ou l'Équateur, et encouragent l'augmentation des superficies dans ces pays. Mais, pour certains fins connaisseurs du secteur, le pari pourrait n’être qu’à court terme, car la Côte d'Ivoire et le Ghana sont en période pré-électorale. À cela s’ajoute le fait que les organes de régulation des deux pays n'ont plus de réserves en raison de la chute des cours de 2016.

Un marché local inexistant L’autre défi à relever pour les producteurs de cacao réside dans l’obtention ou la création d’un marché local. Ni la Côte d’Ivoire, dont la production 2019 - 2020 est estimée à un peu plus de 2 millions de tonnes, ni le Ghana, qui devrait atteindre 800 000 tonnes, n’ont développé d’entreprises locales de transformation, encore moins de marché de consommateurs. Il sera à cette allure difficile d’inverser la tendance du marché. Le gouvernement ivoirien a présenté l’objectif d’atteindre 50% de transformation d’ici à 2020, mais, à un an de cet échéance, seulement 35% sont semi-transformés. La réalisation de cette ambition passera nécessairement par un allègement des conditions d’installation des industries, mais aussi l’éducation des consommateurs aux vertus du chocolat pour que la demande augmente. En moyenne, un Ivoirien consomme 50 grammes de chocolat par an, contre 8 kilos pour un Suisse ou un Belge. Et les initiatives pour produire du chocolat ivoirien de A à Z restent limitées. Actuellement, plus de la moitié de la production mondiale est consommée en Europe occidentale et en Amérique du Nord. Sur ces marchés développés, le chocolat est bien sûr apprécié pour ses qualités gustatives, mais aussi pour ses bienfaits sur la santé, tels que les effets anti-âge, les effets antioxydants, le soulagement du stress ou encore la régulation de la pression artérielle, etc. Les pays producteurs devraient pouvoir s’en inspirer afin de faire grimper la consommation locale. La transformation et la consommation, selon des sources proche du régulateur ivoirien, le CCC, devraient être redynamisées avec des campagnes de promotion vers les pays émergents comme l’Inde et la Chine.

Ouakaltio OUATTARA

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