Inondations à Abidjan : Faut-il craindre le pire ?

Depuis quelques années, le changement climatique a bouleversé la fréquence et l’intensité des pluies dans le monde, et donc en Côte d’Ivoire, partagée entre deux extrêmes. Les averses sont devenues imprévisibles et dangereuses. Hélas, les solutions pour éviter des morts en cascades s’amenuisent au fil des ans. Car le tempo n’est plus dicté par la qualité des infrastructures mais par les éléments. Les zones à risques varient d’une année à une autre et cela rend difficile la riposte et annule les précautions prises des années auparavant.

Rarement des décès pendant la saison des pluies auront causé autant d’émoi. Les deux écoliers emportés par l’eau le vendredi 23 octobre, à la suite de la forte pluie qui s’est abattue sur Abidjan, ont indigné les Ivoiriens. Marvin Kouassi Koua, 14 ans, et son petit frère Christ Kyliane Kouassi, 7 ans, se rendaient à l’école lorsqu’ils ont été piégés par les eaux au niveau canal de Yopougon-Maroc, secteur Kimi. Leurs corps seront retrouvés 48h plus tard. Un choc national !

Sur les lieux le samedi 23 octobre dernier, le ministre la Salubrité et de l’assainissement a tenté de comprendre comment le drame était arrivé. Et, pour une fois, le coupable n’était nul autre que la pluie.

Menaces permanentes Le même jour, la pluie a fait 4 morts à Mossikro (Attécoubé), à la suite d’un glissement de terrain, portant le bilan de cette triste journée à 6 victimes. Une piqûre de rappel. En juillet dernier, la pluie avait déjà fait 2 morts dans la même commune. Encore un éboulement. En 2020, le pays avait pleuré 17 décès à la suite d’un glissement de terrain à Anyama. En 2019, 3 victimes avaient été dénombrées, dont un bébé, pendant un énième éboulement à Yopougon. Deux constats sont à tirer de ce bilan. Le premier est que la pluie a tué consécutivement ces trois dernières années, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps. La deuxième cause ? Elle frappe maintenant à n’importe quel moment de la saison.  Une menace qui devient permanente.

Ce que les experts ivoiriens qualifient de petite et de grande saison des pluies ne sont en fait que la résultante du changement climatique. « Il pleut à n’importe quelle période aujourd’hui à Abidjan. Et ce que nous voyons, c’est que la pluie redouble d’intensité, avec des précipitations qu’on ne voyait pas avant », indique Salif Coulibaly, chargé des questions de salubrité à la mairie d’Attécoubé. Dans son relevé de vendredi dernier, la Société d’exploitation et de développement aéroportuaire, aéronautique et météorologue (SODEXAM) a noté 106 mm de pluie à Attécoubé et 105 mm à Yopougon. Des pluies assez denses pour cette période, le mois de juin étant censé être le plus pluvieux. Les précipitations record enregistrées en juin en Côte d’Ivoire sont de l’ordre de 266 mm en moyenne. En juin 2020, on a enregistré 635 mm de pluie. Dans une étude réalisée la même année sur la pluviométrie en Côte d’Ivoire, le Laboratoire de Physique atmosphérique de l’université de Cocody et le Laboratoire Hydro-sciences de Montpellier ont tenté de comparer les pluies de juin 2019 et celles de juin 2020. L’étude a relevé une pluviométrie anormalement basse (187 mm), il y a deux ans.

Ensuite, elle a analysé l’intensité et la durée des précipitations. Les deux laboratoires ont notamment scruté les pluies des 18 et 25 juin 2020. « Si on s'intéresse, non plus au total tombé durant la journée, mais à la répartition des pluies dans la journée, on constate de grandes différences entre les pluies aux 2 dates. La pluie a duré environ 12h le 18 juin, les intensités étaient faibles. Tandis que le 25, la pluie s’est concentrée sur 3 h. L'intensité moyenne sur 2h le 25 juin est de 82 mm / h, soit une période de retour de 22 ans », signale le rapport.

Soit trop, soit trop peu Les deux derniers incidents intervenus à Mossikro ont été provoqués par des clôtures de logements qui ont cédé, entrainant des éboulements. Les riverains, à l’entendre, n’auraient jamais pensé que ces clôtures pouvaient céder de la sorte. Une situation due à des pluies trop fortes. « Il pleut soit trop, soit trop peu », ajoute Salif Coulibaly.

Consciente du problème, la Protection civile se réorganise. Selon une source à l’Office national de la Protection civile (ONPC), en juin dernier un atelier a été tenu à Grand-Bassam sur la question, organisé par le Programme national changement climatique (PNCC) et l’ONPC. 

« Aujourd’hui, pour freiner les inondations, il faut songer à revoir notre stratégie. La sensibilisation s’avère très utile. Il faut obligatoirement amener les populations à quitter les zones à risques. Parce qu’on ne peut pas influencer la quantité de pluie qui s’abattra chaque année », explique un proche collaborateur du Directeur général de l’ONPC.

Pas de solution Au niveau de l’Office national de l’assainissement et du drainage (ONAD), on est également conscient du phénomène. Mais les services d’Amara Sanogo se disent concentrés sur leur tâche, c’est-à-dire qu’ils respectent les missions assignées à l’ONAD. Au mois de mai dernier, la structure annonçait la fin de la construction d’un barrage écrêteur de crue de Génie 2000 et son ouvrage aval d'environ 1,2 km, l’élargissement des ouvrages de la rue Ministre (ouvrages de section 2X3X2 sur environ 2,4 km) ainsi que l’élargissement des ouvrages d'Allabra (ouvrages de section 5,5X2,5 sur environ 1, 4 km).

À Cocody, des travaux sont en cours au niveau du terrain de golf dans le sous-quartier d’Anono, où l’État réalise 3,5 km de canaux de drainage primaire dans le bassin versant de Bonoumin Riviera Golf. À la Riviera Palmeraie, 880 mètres linéaires de canaux et de dalots primaires sont en construction le long du boulevard Mitterrand, du quartier Triangle au Carrefour Palmeraie.

À Yopougon, il y a eu des ouvrages de drainage des quartiers Koweït et Lokoua, construits sur 21,6 km et traversant les quartiers Maroc, Niangon, Camp Militaire, Koweït, Santé et Lokodjoro. Des milliards de francs CFA d’investissements. Ce qui n’empêche pas chaque année, des morts.

« La qualité des infrastructures ne parviendra pas à changer quelque chose dans les catastrophes que nous vivons à Abidjan. Beaucoup de zones sont devenues des zones à risques », indique Gaoussou Drabo, responsable de la Coordination des mesures d’assainissement à Mossikro, en collaboration avec la mairie d’Attécoubé. D’après lui, pour sauver des vies il faut dégager certaines zones, casser des installations et laisser l’eau passer. Mais pour cela il faut du courage.

Zéro mort Le ministre de l’Assainissement et de la salubrité, Bouaké Fofana, a entrepris la visite de plusieurs sites à risques dès sa nomination à la tête du département. « Ce que nous avons constaté, c’est qu’à chaque saison des pluies les risques s’étendent à des quartiers non répertoriés comme zones rouges. Ça devient de plus en plus difficile de mener la politique Zéro mort en saison des pluies, parce que nous ne contrôlons pas la météo. C’est d’ailleurs ce que nous voyons en Europe, où de grandes villes sont inondées et où il y a parfois des morts », explique un membre du cabinet du ministre. L’impuissance ? Ça y ressemble. Et les Ivoiriens le savent.

« Ce que nous attendons, c’est que la météo nous prévienne à temps lorsque des fortes pluies sont prévues. La Sodexam publie les résultats une à deux heures avant les pluies. Les gens n’ont pas le temps de s’y préparer », note par exemple Aboulaye Diakité, maintenancier dans une société privée. Tout comme lui, de nombreux Abidjanais appellent la structure à publier les données un à deux jours avant les averses. Cela suffira-t-il à s’en prémunir ? Dans son rapport d’août dernier, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a prévenu que le réchauffement de la planète Terre pourrait atteindre le seuil de +1,5°C autour de 2030, 10 ans plus tôt qu'estimé précédemment. Une situation qui pourrait provoquer des canicules et des inondations en série.

Raphaël Tanoh

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