Entre liberté d'expression et prison économique

Une presse plurielle en proie à des difficultés.

Classée 86ème au rang des pays où s’exerce la liberté de la presse, la Côte d’Ivoire veut améliorer son image. Un projet de loi visant à adapter le cadre juridique de la presse aux évolutions du secteur vient d’être adopté. Celui-ci prend en compte les médias numériques, et assouplit les conditions de création d’une entreprise de presse. Mieux, il prévoit l’exclusion de la peine d’emprisonnement et de la détention préventive. Une avancée significative dans un contexte de paix et de liberté d’expression encore fragile, après une décennie de crise durant laquelle la presse a été mise à l’index. Ce projet de loi intervient également alors que les chiffres de vente poursuivent leur chute.

Un projet de loi qui vise à adapter le cadre juridique de la presse aux exigences actuelles liées à l’évo- lution du secteur, qui prend en compte les nouveaux types de médias, en par- ticulier ceux utilisant les supports numériques ou les réseaux de téléphonie mobile ». Ce sont là des propos lancés, avec fierté, par Bruno Nabagné Koné, le porte-parole du gouvernement, ministre de l’Économie numérique et de la Poste, au sortir du Conseil des ministres du 3 août dernier. Dans ce dispositif, qui intervient quelques mois après un séminaire des professionnels de la presse sur la question, l’innovation majeure est « l’exclusion de la peine d’emprisonnement pour des faits qualifiés de délits de presse, l’exclusion de la garde à vue et de la détention préventive ». Toutefois, cela reste sous réserve des dispositions des articles 174 et 175 du Code pénal, qui s’appliquent dans certains cas (incitation au vol, au pillage, au meurtre, incitation à la xénophobie, à la haine tribale, raciale, religieuse, apologie de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, incitation des forces de l’ordre à l’insoumission et à la rébellion, atteinte à l’intégrité du territoire national). Enfin, ce projet de loi, qui sera devant les parlementaires en octobre prochain, assouplit les conditions de création de l’entreprise de presse et renforce le principe de la liberté de presse en Côte d’Ivoire.

Pressions politiques
Après un bond positif de 15 places en 2014, la Côte d’Ivoire a stagné à la 86ème place entre 2015 et 2016. Une situation que Baudelaire Mieu, représentant de Reporters sans frontières (RSF) en Côte d’Ivoire, impute à deux faits majeurs. D’abord, le retard que le gouvernement a accusé dans l’ouverture du secteur audiovisuel, alors que cela était une promesse de campagne du président Alassane Ouattara depuis 2010, et ensuite, le piétinement dans l’affaire Guy André Kiefer. Selon lui, même si les journalistes ivoiriens sont de moins en moins emprisonnés, il n’en demeure pas moins que ces derniers subissent encore des pressions venant des partis politiques et de certains groupements sociaux. Cette situation, à l’en croire, fait que « les journalistes sont parfois assez prudents, afin de ne pas aborder des sujets qui peuvent fâcher ». Par ailleurs, le Conseil national de la presse (CNP), dans son rapport 2015 remis au chef de l’État en juillet dernier, fait état du fait que l’année dernière, un journaliste a passé cinq jours en détention à la Mai- son d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) pour offense au chef de l’État. Toujours selon l’organe de régulation, en mai dernier, Laurent Despas, patron du site Internet Koaci.com, et l’un de ses collaborateurs ont été brièvement interpellés, avant d’être libérés après une garde à vue de 24h dans un camp de gendarmerie. Pour sa part, Moussa Zio, président de l’Observatoire pour la liberté de la presse, de l’éthique et de la déontologie (OLPED), estime que la question de la liberté de la presse en Côte d’Ivoire est aussi économique. « La liberté, ce n’est pas seulement le fait de ne pas se retrouver en prison. La liberté, c’est aussi que les journaux marchent. Mais, aujourd’hui, économiquement, les entreprises de presse sont en prison, avec des journalistes qui ne sont pas bien payés. Ce qui les rend vulnérables », souligne-t-il.

Ventes en chute libre
Comme l’indique le CNP, la vente des journaux, entre 2014 et 2015, a chuté de près de 10%, alors qu’une étude publiée en 2015 et portant sur la période de 2005 à 2015, faisait état d’une chute globale de vente des journaux quotidiens de plus de 60% en dix ans. Cette mauvaise passe s’expliquerait par l’avènement des nouveaux médias propulsés par Internet, avec une floraison de sites d’information. Sans perdre de vue la téléphonie mobile utilisée de plus en plus comme support d’information. À cela il faut ajouter l’augmentation du prix des journaux, passés de 200 à 300 francs CFA pour les quotidiens, et de 300 à 500 francs CFA pour les périodiques, et cela après une décision du Groupement des éditeurs de presse de Côte d’Ivoire (GEPCI) en avril 2014.

Assouplissement
Le projet de loi entend faciliter la création d’entreprises de presse, dans un contexte où la quasi-totalité des titres nés après la crise post-électorale ont mis la clef sous le paillasson pour des raisons économiques. Certains pour avoir connu des méventes, et d’autres contraints par le CNP pour non-respect de la convention collective des journalistes professionnels et professionnels de la communication. Et ce malgré une enve- loppe budgétaire de 800 millions de francs CFA mise à la disposition des organes de presse par l’État, au titre de l’année 2016, afin de les aider dans l’impression des journaux. Mais, pour Guillaume Gbato, secrétaire général du Syndicat national de la presse privée de Côte d’Ivoire (SYNAPPCI), il faut restructurer l’aide budgétaire de l’État, afin d’extirper de la profession tous « les patrons et tous les organes de presse qui rusent avec la loi. Car, on ne peut revendiquer une aide de l’État et fouler au pied les lois du même État », soutient-il. Pour ce dernier, cette restructuration devra permettre de mettre de l’ordre dans le secteur et accroître la part budgétaire « des entreprises sérieuses ».
Fin de l’informel
La presse en ligne pourra enfin connaître un début d’organisation. Le nouveau projet de loi, s’il est adopté par les députés, devra donner un cadre juridique pour la création d’entreprises de nouveaux médias. Pour l’heure, celles-ci échappent à toute juridiction ivoirienne. « N’importe qui, parce qu’il a un accès à Internet, crée un site d’information, est seul à l’animer et prétend être patron de presse », avait ironisé Moussa Zio en décembre dernier, lors d’un séminaire de formation des acteurs de la presse en ligne. Le nouveau cadre juridique devra également établir une diffé- rence juridique entre les blogs et les sites Internet.

Ouakaltio OUATTARA

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